Par les menbres du caveau

Chanson de la femme

La bouche

Air : A l’âge heureux de quatorze ans

La femme, qui de l'art d'aimer

A déjà fait l'apprentissage,

Sait employer pour nous charmer,

De sa bouche le doux langage ;

Mais fille, à l'âge de seize ans,

Dans une amoureuse escarmouche,

Pour répondre aux tendres amants,

Fait toujours la petite bouche.

 

J'espérais trouver le bonheur

Près de la sémillante Adèle ;

Ayant toujours la bouche en cœur,

Quand je lui parlais bagatelle :

Elle fit avec moi longtemps

La petite sainte nitouche,

J'appris plus tard, à mes dépens,

Ame défier de sa bouche.

 

Il est heureux, sans contredit,

Devoir une bouche adorable,

Vous adresser avec esprit,

Une phrase, un sourire affable.

De la femme qui, sottement,.

Gronde d'un rien et prend la mouche,…

Puissions-nous, pour notre agrément,

Matin et soir clouer la bouche !

 

Autrefois, un souper frugal

Charmait une jeune compagne ;

Maintenant, au sortir du bal

Il faut des truffes, du Champagne ;

Sans bombance, il n'est plus d'amour.

Et la grisette qui vous touché,

S'y laisse prendre, chaque pur,

Moins par le cœur que par la bouche.

 

Quand vous suivez en tapinois

Jeune fille aux lèvres vermeilles,

Vous pensez qu'une douce vois

Soudain va flatter vos oreilles;

Et puis, combien l'on reste sot,

Lorsque introduit très de sa couche.

Vous entendez un bien gros mot

Sortir de sa petite bouche.

 

Mais, si la bouche en bien des cas

Nous cause de vives alarmes.

De l'enfance jusqu'au trépas,

Elle sèche aussi bien des larmes :

Qui sait promptement apaiser

L'être au berceau, l'homme farouche,

N'est-ce pas le tendre baiser

Que lui donne une aimable bouche ?

Lyon,

Membre titulaire.

 

 

 

 

La joue

Air : Des fraises

À mon sujet, sans détour,

Loin de faire la moue,

J'admire son fin contour.

Et j'embrasse avec amour

La joue!

 

Il est de charmants attraits

Où Cupidon se joue :

Quand ils sont dodus et frais,

Pour ceux-là je quitterai

La joue !

Duval,

Membre associé.

 

 

 

 

Le jarret

Air : De Calpigi

Un mien amide la Corrèze,

A qui je peignais mon malaise,

Du mot que le sort m'envoya,

Me disait, dans son charabia :

«  Par mejure disciplinaire,

« Le chort vous traite en militaire,

« Et pour quelques galants méfaits,

« Vous voilà, mon cher, aux jarrets. »

 

Ce mot, messieurs, nous représente

Une retraite complaisante,

Où l'amour court le guilledou

Sous l'abri discret du genou;

Dans l'escalade graduelle

De jambe plus ou moins rebelle,

Notre main fait un temps d'arrêt

A son arrivée au jarret.

 

J'ai quitté la petite Isaure,

Qui m'aimait bien, qui m'aime encore,

Et qui, m'ouvrant ses petits bras,

Me livrait ses petits appas ;

Elle était belle, aimable et bonne,

Mais, de sa petite personne

La jambe étant courte, elle avait

La taille trop près du jarret.

 

Nos maîtres des cérémonies,

Pour s'éviter des avanies,

M'auraient dû placer, sur leur plan,

Entre Lesueur et Duplan :

Imitant ainsi la nature

Qui, dans sa belle architecture,

De la femme a mis le jarret

Entre la cuisse et le mollet.

J. Kraus.

Membre correspondant

 

 

 

Les vapeurs

Air : On dit que je suis sans malice

Grâce au progrès qui nous entraîne,

La Vapeur règne en souveraine;

Moteur puissant...universel…

Elle anime tout sous le ciel ;

Mais, longtemps savant que notre âge

En fit, à tort, son apanage,

Un sexe, aux dehors bien trompeurs.

Connaissait déjà les vapeurs !

 

En effet, la locomotive

Ne sillonnait aucune  rive,

Que, dans la ruelle et le boudoir,

Les vapeurs fondaient leur pouvoir ;

Diagnostics d'envie ou de peines,

De nos grand’mères les migraines.

Pour nos aïeux, motifs de peurs,

N'étaient autres que des vapeurs !

tin désir... l'ennui...la colère...

Un désir… l’ennui… la colère…

Sont le combustible ordinaire

Qui, chez les femmes, du cerveau

Fait une espèce de fourneau ;

Un sein qui bat est la chaudière

Qui guide la machine entière,

Les yeux sont les régulateurs...

En deux mots, voilà les vapeurs !

 

D'une manière très adroite,

De nos jours le beau sexe exploite

Ce moyen sûr et des plus fins,

Pour en arriver à ses fins ;

Il en use et même en abuse,

Car, bien souvent, ce qu'on refuse

À ses prières, à ses pleurs...

Il l'obtient grâce à ses vapeurs !

 

De la langoureuse Maxime (1)

L'époux est chauve et cacochyme,

Mais un cousin vient chaque soir

La distraire...et quand, plein d'espoir,

L'époux, d'un, vieux reste de flamme,

Voudrait...la soubrette, bonne âme,

Fermant la porte à ses ardeurs,

Lui dit : Madame a ses vapeurs !

 

(1)  Ne pas confondre avec Mademoiselle Maxime célèbre tragédienne.

 

Vous, épouses, par trop candides,

Si vos Crésus, par trop sordides,

Pour vos souhaits se montrent sourds,

À ce moyen ayez recours :

Oui, pour avoir hôtel... voiture,

Diamants...robes à guipure,

Cachemire aux riches couleurs,

Avant tout, ayez des vapeurs !

 

Ce mal a si bien pris racine,

Qu'on guérit la gent féminisme

D'un abcès... d'une fluxion...

Même d'une inflammation ;

On la guérit d'une chlorose,

Ainsi que de... bien autre chose,

Mais jamais nos savants docteurs

Ne la guériront des vapeurs !

 

Le but de ma  chanson s'explique,

Et sa morale est sans réplique,

Epoux... amants...pour être heureux,

De vos belles comblez les vœux,

Sinon un bruit, une tempête

Mettraient en péril votre tête...

Craignez moins les esprits frappeurs

Que de ces dames les vapeurs !

A. Salin,

Membre honoraire.