Simonnet annonçait un méchant caractère ;
À le morigéner chacun perdait son temps.
C'était un villageois, il n'avait que douze ans,
& déjà ne trouvait de plaisir qu à mal faire.
Les Bergers le fuyaient : lorsqu'il venait aux champs,
il frappait sans pitié les troupeaux innocent,
Enlevait un agneau quand il tétait sa mère,
& lorsque du hameau, quelque jeune bergère
Admirait ses appas., au bord d'un clair ruisseau,
Le malin enfant troublait l'eau,
Étant bien sûr de lui déplaire.
Des amours au printemps il était la terreur.
Dénichant détruisant les hôtes du bocage,
De tous les nids il troublait le bonheur.
Si le révère Aréopage
Avait décidé de son sort,
Dans Athènes jadis il eut souffert la mort ;
Mais chez -tous, grâce au ciel, on a plus d'indulgence.
Laissons venir l’expérience,
Nous verrons Simonnet changer:
C’est le meilleur moyen, je pense,
Que l'homme ait pour se corriger.
Un jour que cet enfant ne savait trop que faire,
Le jour le plus chaud de l’été ,
Il renverse avec cruauté
La ruche, le trésor de Pierre,
Le plus pauvre vieillard , mais le plus respecté
Qui toujours lui prêchait d'entre bon, doux & sage,
Mais qui jamais n'en était écouté.
Miel & cire , tout fut gâté
le petit scélérat paya cher le dommage;
L'essaim chassé, de fureur bourdonnant ,
Sont tout à-coup sur cet enfant,
Qui ne pur éviter sa rage.
Le vieillard l'entendit crier de sa maison;
Il vient à son secours : alors plus de sermon ;
Il calme ses douleurs, sans regrets ni murmures,
En répandant fur ses blessures
un baume exquis de sa façon.
L'enfant pleure & lui. dit: ô ! quels soins sont les vôtres ?
Je vous croirai toujours , cher & trop bon vieillard
Oui, je vois que l’on fait son malheur tôt ou tard
En troublant le bonheur des autres.
Contraint de renoncer à la chevalerie, Don Quichotte voulut, pour se dédommager, Mener une plus douce vie, Et choisit l’état de berger. Le voilà donc qui prend panetière et houlette, Le petit chapeau rond garni d’un ruban vert Sous le menton faisant rosette. Jugez de la grâce et de l’air De ce nouveau Tircis ! Sur sa rauque musette Il s’essaie à charmer l’écho de ces cantons, Achète au boucher deux moutons, Prend un roquet galeux, et, dans cet équipage, Par l’hiver le plus froid qu’on eût vu de longtemps, Dispersant son troupeau sur les rives du Tage, Au milieu de la neige il chante le printemps. Point de mal jusques là : chacun à sa manière Est libre d’avoir du plaisir. Mais il vint à passer une grosse vachère ; Et le pasteur, pressé d’un amoureux désir, Court et tombe à ses pieds : ô belle Timarette, Dit-il, toi que l’on voit parmi tes jeunes sœurs Comme le lis parmi les fleurs, Cher et cruel objet de ma flamme secrète, Abandonne un moment le soin de tes agneaux ; Viens voir un nid de tourtereaux Que j’ai découvert sur ce chêne. Je veux te les donner : hélas ! C’est tout mon bien. Ils sont blancs : leur couleur, Timarette, est la tienne ; Mais, par malheur pour moi, leur cœur n’est pas le tien. À ce discours, la Timarette, Dont le vrai nom était Fanchon, Ouvre une large bouche, et, d’un œil fixe et bête, Contemple le vieux Céladon, Quand un valet de ferme, amoureux de la belle, Paraissant tout-à-coup, tombe à coups de bâton Sur le berger tendre et fidèle, Et vous l’étend sur le gazon. Don Quichotte criait : arrête, Pasteur ignorant et brutal ; Ne sais-tu pas nos lois ? Le cœur de Timarette Doit devenir le prix d’un combat pastoral : Chante, et ne frappe pas. Vainement il l’implore ; L’autre frappait toujours, et frapperait encore, Si l’on n’était venu secourir le berger Et l’arracher à sa furie. Ainsi guérir d’une folie, Bien souvent ce n’est qu’en changer