BagatelleSi vous voulez vous promenerDans ce bois, charmante Isabelle,Nous pourrions, sans nous détourner,Aller jusques à Bagatelle.Partons ; donnez-moi votre bras ;La cinquième heure nous appelle :En cheminant à petit pas,Nous parlerons de Bagatelle.Ah si j’osais vous embrasser !Et si vous étiez moins cruelle !Mais n’allez pas vous courroucerA la porte de Bagatelle.Quand on vous verrait sans manteau,Dans ce taillis qui nous recèle,Le cas ne ferait pas nouveau,Devant aller à Bagatelle.Séchez vos pleurs, point de courrouxContre un amant tendre et fidèle ;Ou plutôt raccommodons-nousEn approchant de Bagatelle.Mais, sous l’ombrage, avec Mysis,Je vois notre voisine Adéle.Vraiment l’on n’est dans tout ParisOccupé que de Bagatelle.Venez, avançons hardimentDans la route ancienne, ou nouvelleUn aveugle très aisementPeut arriver à Bagatelle.Examinez ce vieux donjon,Bâti par un roi, que sa belleJadis fit repentir, dit-on,D’avoir trop aimé Bagatelle.Le portier est rude et fâcheux ;Je crains son humeur et son zèle.Une femme conviendrait mieuxA la garde de Bagatelle.Il vous observe en souriant.Hélas ! qui peut-être rebelle A deux beaux jeux, sollicitantPour que l’on ouvre Bagatelle.Dans l’hermitage asseyons-nous.Heureux, en ornant sa chapelle,Celui qui pourrait avec vousSe faire ermite à Bagatelle !Regarder ces dieux, ces Sylvains,Dont la vigueur est éternelle :Ils semblent narguer les humains,Forcés de quitter Bagatelle.Ces eaux, ces grottes, ce palais,Où le maître souvent appelleLe heureux que son cœur a faits ;Tout vous attache à Bagatelle.Mais il faut partir, la nuit vient ;Soyez raisonnable, ma belle.On ne peut, vous le savez bien,Être toujours à Bagatelle.Promettez-moi de m’avertirToute les fois, chère Isabelle,Que vous aurez quelque désirDe faire un tour à Bagatelle.Par M. Daillant de la Touche ÉlégiePlus ne verrai,C’est pour la vie,Plus n’entendraiMa douce amie ;Plus ne vivrai.Tant doux bocage,Qu’elle enchantait ;Joli rivage,Où son imageSe répétait ;Oiseaux volagesQu’elle appelait ;Tendres herbagesQu’elle foulait ;Écho sauvage,Qui murmuraisSon doux langage ;Gentil feuillage,Qui la couvraitDe ton ombrage :Plus ne verrez,C’est pour la vie ;Plus n’entendrezMa douce amie :Vous périrez,Adieu, Zéphire !Bientôt la mortVa me conduireAu sombre bord,Qui je désire.Chêne orgueilleux,Roi du bocage,Dont le feuillageCouvrait nos yeux ;Abri tranquille,Qui, tous les jours,A nos amoursServais d’asile ;Vaste berceau,Retraite sombre,Prêtez votre ombreA mon tombeau.Plus de la vie,plus ne verrai,Plus n’entendraiMa douce amie…Plus ne vivrai.Par M. hoffman